En 2022, plusieurs variables économiques ont subi des changements d’une ampleur à laquelle la dernière décennie ne nous avait pas habitués. Dans ce contexte, certaines décisions que vous prendrez maintenant pourraient avoir des conséquences budgétaires et fiscales non négligeables en 2023. En voici quelques-unes, dont vous voudrez peut-être discuter avec votre conseiller avant la fin de l’année.
En premier lieu, apprendre à naviguer dans la tempête
Les turbulences de 2022 ont principalement touché les particuliers de trois façons : leur pouvoir d’achat a chuté en raison de l’inflation, la valeur de leurs investissements a diminué en raison de la volatilité des marchés, et leurs coûts d’emprunt ont augmenté sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt – laquelle a aussi entraîné un ralentissement du marché immobilier. La meilleure approche pour naviguer à travers de telles conditions consiste à établir ou à réviser votre budget, avant d’aborder les décisions qui s’imposeront. Tout particulièrement, si vous devez contracter ou renouveler une hypothèque en 2023, vous voudrez sans doute tenir compte des coûts d’emprunt beaucoup plus élevés qui vous attendront, comme le tableau suivant en donne une idée. Votre conseiller pourrait vous aider à évaluer vos différentes options, notamment le choix entre un taux variable et un taux fixe, de même que le terme de votre emprunt.
RAP : maintenant ou plus tard ?
À ce sujet, nos gouvernements mettent de l’avant différentes mesures pour favoriser l’achat d’une résidence, malgré des prix de vente qui demeurent élevés et des taux hypothécaires à la hausse. Le plus ancien est le régime d’accession à la propriété (RAP), qui permet aux contribuables canadiens d’utiliser jusqu’à 35 000 $ de leur régime enregistré d’épargne-retraite (REER) pour constituer leur mise de fonds sur leur première propriété. Depuis 2019, un autre programme, l’Incitatif à l’achat d’une première propriété (IAPP), permet d’obtenir un prêt hypothécaire avec une « participation » du gouvernement fédéral qui vient réduire les mensualités. Enfin, dans son budget 2022-2023, le gouvernement fédéral a annoncé la création prochaine du compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP) qui permettra d’épargner à l’abri de l’impôt afin d’acheter une première maison.
Si toutefois le bon vieux RAP vous semble encore la meilleure option, peut-être voudrez-vous attendre le début de 2023 pour l’ouvrir. Cela vous donnera un an de plus pour réaliser votre projet d’achat ou de construction, puisque celui-ci doit se faire au plus tard en octobre de l’année suivant l’ouverture du RAP.
Perdez maintenant, gagnez en avril
Une stratégie fiscale très courante en fin d’année consiste à vendre certains placements sous-performants pour réaliser des pertes en capital. Ces dernières pourront alors être appliquées contre des gains en capital réalisés lors de la même année ou lors des trois années antérieures. L’année 2022, avec ses contre-performances boursières, pourrait ainsi permettre de transformer des pertes d’investissement en économies d’impôt. Des règles très strictes entourent cependant ces opérations et il peut être important de consulter à la fois son conseiller et son comptable. À noter aussi qu’on ne peut effectuer des ventes à perte pour fins fiscales que dans un compte imposable – ce qui exclut notamment le REER et le compte d’épargne libre d’impôt (CELI).
Enfin, soulignons que le dernier jour pour effectuer des transactions sur placements au Canada et avoir la possibilité de les attribuer à l’année 2022 est le 28 décembre.
Attention aux distributions de fin d’année
Si vous vous apprêtez à acheter un fonds commun de placement dans un compte imposable, peut-être voudrez-vous vous renseigner d’abord, auprès de votre conseiller, à propos des distributions de fin d’année. Plusieurs fonds communs, en effet, « distribuent » à leurs porteurs de parts, dans les derniers jours de l’année, leurs gains en capital, dividendes et intérêts du dernier exercice. Le cas échéant, ces revenus s’ajouteront au revenu imposable du particulier, même si celui-ci vient tout juste d’acheter son placement et n’a encore réalisé aucun profit en argent sonnant. Évidemment, ces distributions viennent par ailleurs modifier le coût de base rajusté des parts détenues, de telle sorte que le particulier ne sera pas perdant au bout du compte, lors de la revente. Néanmoins, peut-être préférerez-vous faire votre achat après le versement des distributions.
Vous avez eu 71 ans? Le temps est venu de convertir votre REER.
Si vous avez eu 71 ans en 2022, vous avez jusqu’au 31 décembre pour convertir votre REER, qui était un outil d’accumulation d’épargne-retraite, en une rente ou en un fonds enregistré de revenu de retraite (FERR). Ceux-ci sont des outils de distribution de l’épargne-retraite et vous verseront dès lors des montants prescrits chaque année. Cependant, vous avez aussi jusqu’au 31 décembre pour effectuer une toute dernière cotisation à votre REER si vous avez une marge de cotisation inutilisée.
CELI et REER : des règles à respecter
Si vous comptez ajouter à vos cotisations REER pour 2022 afin de maximiser votre déduction d’impôt, sachez qu’il n’est pas obligatoire de le faire avant la fin de l’année. En effet, toute cotisation effectuée dans les 60 premiers jours de 2023 pourra être appliquée, à votre choix, soit à l’année 2022, soit à l’année 2023. En revanche, les règles qui entourent le CELI sont parfois plus difficiles à appliquer, particulièrement pour ce qui a trait aux retraits et aux cotisations. Pour cette raison, si vous envisagez de faire un retrait prochainement, il vaudrait peut-être mieux le faire avant la fin de 2022 plutôt que dans les premiers jours de 2023. De la sorte, si vous faites des cotisations importantes à votre CELI en 2023, vous ne risquerez pas de recotiser dans la même année les sommes que vous avez retirées – ce qui donnerait lieu à des pénalités. Notez par ailleurs qu’avec l’inflation élevée qui prévaut, on s’attend à ce que les droits de cotisation au CELI, qui sont actuellement de 6 000 $ par année, soient rehaussés en 2023.
Crédits d’impôt pour les familles : à vérifier !
Au niveau fédéral comme au niveau provincial, la législation fiscale prévoit de nombreux crédits d’impôt pour les familles et la garde d’enfants, voire pour les aidants naturels. Pour en avoir une idée, on peut consulter la page web à ce sujet sur le site du gouvernement du Canada, et les pages équivalentes sur les sites web de sa province de résidence. Point important cependant : pour réclamer ces déductions et crédits sur la déclaration de revenus que vous produirez en mars ou avril, il faut que les situations et les dépenses qui vous y donnent droit soient effectives en 2022.
Un REEE pour Noël?
Si vous souhaitez faire à un enfant ou petit-enfant un cadeau plus porteur d’avenir que la dernière console de jeu vidéo, le régime enregistré d’épargne-études (REEE) pourrait être un choix avisé. C’est un régime dans lequel les rendements se composent à l’abri de l’impôt jusqu’à ce que les fonds soient retirés pour couvrir les frais liés à des études postsecondaires. Plus encore, les cotisations de chaque année donnent droit à la Subvention canadienne pour l’épargne-études (SCEE), qui comporte un volet de base, de 20 % du montant cotisé sans égard au revenu familial, et un volet supplémentaire, qui peut ajouter de 10 % à 20 % si le revenu familial est inférieur à un certain seuil. Des subventions provinciales peuvent aussi venir s’ajouter (par exemple, de 10 % du montant cotisé, dans le cas du Québec), de même que le Bon d’études canadien, qui peut atteindre 2 000 $ pour certaines familles. Pour obtenir des subventions pour 2022, on doit cotiser avant le 31 décembre. Votre conseiller pourra vous fournir toutes les précisions nécessaires.
Le temps de redonner
Un don fait en 2022 à un organisme de bienfaisance admissible engendrera des déductions d’impôt sur votre prochaine déclaration de revenus. Il existe en effet un crédit d’impôt fédéral de 15 % pour les sommes sous le seuil de 200 $ et de 29 % pour toute somme au-delà, le tout sous certaines conditions. De plus, des crédits d’impôt provinciaux peuvent aussi être réclamés. Selon la province, l’économie d’impôt totale engendrée par un don pourrait aller de quelque 40 % à quelque 50 % du montant du don. Cependant, si vous disposez de sommes importantes, il pourrait être souhaitable de vous doter d’une véritable stratégie de dons planifiés. Mise en place avec des conseils professionnels, celle-ci pourrait faire appel notamment à des dons sous la forme de titres de placement admissibles ou de polices d’assurance vie. À l’agenda en 2023?
Entrepreneurs, pensez au revenu passif
Enfin, si vous êtes propriétaire d’une PME, la fin de l’année est un bon moment pour consulter votre conseiller et votre comptable à propos des règles fiscales sur le revenu passif. Celles-ci, en effet, viennent lier le revenu que votre entreprise tire de ses placements – son « revenu passif » – et son admissibilité au taux d’imposition réduit dont peuvent profiter les PME sur leur bénéfice d’exploitation (connu sous le nom de « petit taux »). Ainsi, tout revenu passif au-delà de 50 000 $ viendra réduire le montant de votre profit qui sera admissible au petit taux d’imposition. Cette disposition pourrait vous amener à prendre des décisions sur vos placements, vos salaires, vos dividendes et vos dépenses d’entreprise, de façon à minimiser soit votre revenu passif, soit vos bénéfices imposables.
Il ne s’agit ici que d’un survol à haut niveau des décisions que vous pourriez avoir intérêt à envisager avant la fin de l’année. Pour une étude plus en détail, communiquez avec votre conseiller – de préférence dès maintenant.
Les sources suivantes ont été utilisées dans la rédaction de cet article.
Actualis, « Bientôt 2020 » ; « Qu’est-ce que le revenu passif? » ; « Dons planifiés : pour faire une différence ».
Gouvernement du Canada, « Options pour vos REER lorsque vous atteignez 71 ans » ; « Déductions et crédits pour la famille, la garde d’enfants et les aidants naturels » ; « Régime enregistré d'épargne-études (REEE) ».
Investment Executive, « Inflation to trigger bump in TFSA room in 2023 ».
Placements mondiaux Sun Life, « Sept conseils fiscaux de fin d’année pour les Canadiens ».
SCHL, « Calculateur hypothécaire ».
Statistique Canada, « Société canadienne d'hypothèques et de logement, taux des prêts hypothécaires ordinaires, terme de 5 ans ».